La lettre de MPS n°15

Droit social                            

La Lettre de MPS AVOCATS

21 février 2017                         

            

DENONCIATION PAR L’EMPLOYEUR DU SALARIE AUTEUR D’UNE INFRACTION ROUTIERE

 

La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, et son décret d’application du 28 décembre 2016, font obligation aux employeurs de dénoncer les salariés qui commettent des infractions avec un véhicule de l’entreprise.

Une nouvelle obligation s’applique depuis le 1er janvier 2017 au représentant légal des personnes morales titulaires d’un certificat d’immatriculation du véhicule, quelle que soit la personne qui a commis l’infraction. L’employeur, qui reçoit l’avis de contravention, doit transmettre dans un délai de 45 jours, à compter de l’envoi ou de la remise de l’avis de contravention, le nom et l’adresse du salarié qui conduisait le véhicule au moment de l’infraction.

Seule exception : si l’employeur prouve l’existence d’un vol, une usurpation de plaque d’immatriculation ou tout autre évènement de force majeure.

Les infractions visées

Le nouvel article L. 121-6 du Code de la route renvoie aux infractions constatées selon les modalités prévues à l’article L. 130-9 du même code, c’est-à-dire par des appareils de contrôle automatique ayant fait l’objet d’une homologation ou radars. Plus précisément, il s’agit des infractions constatées par ce moyen relatives à la vitesse maximale des véhicules, aux distances de sécurité entre véhicules, au dépassement, au franchissement et au chevauchement de lignes continues, aux signalisations imposant l’arrêt, à la présence de véhicules sur certaines voies et chaussées réservées à certaines catégories de véhicules, au port de la ceinture de sécurité, à l’usage du téléphone tenu en main, à la circulation sur les bandes d’arrêts d’urgence, à l’obligation d’être assuré, à l’obligation du port d’un casque pour les conducteurs de deux-roues, trois roues ou de quadricycle, et enfin à l’engagement dans l’espace compris entre les deux lignes d’arrêt à un feu de signalisation, réservé aux cycles et cyclomoteurs (C. route, art. R. 130-11).

À la lecture combinée des articles L. 121-6 et L. 130-9, une infraction qui n’est pas constatée par radar, par exemple en cas de stationnement interdit, n’entre pas dans le champ de l’obligation de dénonciation.

Questions pratiques :

- En cas de location du véhicule par l’entreprise : Le nom du locataire figure sur le certificat d’immatriculation à côté de celui du loueur qui reste, juridiquement, le titulaire du certificat d’immatriculation. Pour la responsabilité pécuniaire, il est expressément prévu que le locataire est redevable (C. route, art. L. 121-2 et L 121-3). Une formulation similaire n’a pas été prévue pour l’obligation de dénonciation. Cependant les travaux parlementaires indiquent que la nouvelle obligation vise les « propriétaires et locataires de flottes de véhicules » (Rapp. no 3726, p. 195). L’employeur devra donc procéder à la dénonciation du salarié conducteur.

- Véhicule non attribué spécifiquement à un salarié : L’employeur doit se doter d’un outil permettant de connaître les horaires de conduite des salariés utilisant un même véhicule (le salarié envoie un courriel lors de la prise et de la remise du véhicule, …). L’employeur doit procéder à l’information des salariées  concernant cette nouvelle obligation. Ce peut être un document prévoyant que le salarié confirme qu’il était bien au volant au moment de l’infraction, ou à défaut, qu’il communique à l’employeur le nom de la personne qui conduisait).

- Si le conducteur ne peut pas être identifié : L’article L. 121-3 du Code de la route s’applique et l’employeur paye l’amende sans affectation de la perte de points de permis.

- Sanction : L’employeur qui ne dénonce pas l’auteur de l’infraction encourt une amende pouvant aller jusqu’à 750 € (amende prévue pour les contraventions de 4è classe). Attention : c’est la responsabilité personnelle du chef d’entreprise, personne physique, qui est engagée. Il ne peut donc pas se faire rembourser par l’entreprise. De plus, l’employeur reste redevable pécuniairement de l’amende due au titre de l’infraction commise (C. route, art. L. 121-3).

- La contestation de la contravention par le salarié : Comme tout conducteur, il peut contester les contraventions dont il fait l’objet. Il peut prouver qu’il n’était pas au volant au moment de l’infraction. Il peut aussi engager la responsabilité de l’employeur en cas de dénonciation calomnieuse.

Attention : Le salarié peut demander à ce que l’amende soit partiellement ou totalement mise à la charge de l’employeur s’il établit que les circonstances de fait ou ses conditions de travail sont à l’origine de la commission de l’infraction notamment en raison des cadences ou des durées de livraison, par exemple en cas d’excès de vitesse (cf. C. route, art. L. 121-1 ; Rép. Carier AN, no 7444, 19 avr. 1968, min. Justice).